30 octobre 2023
Tramways de Paris
Cerema
Du 17 au 19 octobre 2023, près de 7 000 acteurs du transport public et de la mobilité durable se sont retrouvés à Clermont-Ferrand lors des Rencontres nationales du transport public (RNTP) et du congrès du Club des villes et territoires cyclables et marchables (CVTCM). Le Cerema était présent avec des interventions sur la performance des lignes de bus, le déploiement des modes actifs, l’apaisement des villes ainsi qu’une présentation de la plateforme d’essai unique en Europe pour le véhicule autonome. Lors de la session de clôture, la combinaison des modes actifs et des transports collectifs a été abordée.

Les spécialistes du Cerema étaient aux Rencontres Nationales du Transport Public, pour échanger et présenter des retours d'expériences en matière de transport en commun, d'intermodalité, d'apaisement des mobilités notamment. Événement majeur réunissant les acteurs du domaine, ce rendez-vous annuel est l'occasion d'échanger  entre acteurs publics et privés sur les grands enjeux comme sur les problématiques concrètes dans le domaine du transport public. En parallèle, se déroulait le congrès du Club des villes et territoires cyclables et marchables, qui réunit les acteurs œuvrant au développement des mobilités actives. 

 

Vélo et transport collectif : avancer ensemble pour une ville plus apaisée

Intervention de P TerrasseLors de la conférence plénière de clôture des RNTP organisée par la GART (Groupement des autorités organisatrices de transport) et l'UTP (Union des Transports Publics), Pascal Terrasse, directeur général adjoint du Cerema, est intervenu au côté d’Alain Jung, vice-président aux mobilités de l'Eurométropole de Strasbourg, Annelise Avril, DG France de Keolis, Christophe Babe, directeur de la SIBRA (réseau d’Annecy) et vice-Président d’AGIR, et Françoise Rossignol, présidente du CVTCM. 

Les participants à cette table-ronde ont réagi aux propos introductifs de Sonia Lavadinho, chercheuse à l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne, sur les leviers pour apaiser les villes, à travers l’aménagement des voiries et des espaces publics. Elle a notamment insisté sur la nécessité de reprioriser la géométrie des réseaux de mobilité en travaillant sur la desserte des périphéries plus que les centres, sur l’aménagement des rocades plus que des pénétrantes, et sur les "nœuds de mobilité" plus que les lignes.

Différents leviers d’aménagement de l’espace ont été mis en avant :

  • Déléguer le rabattement de proximité aux modes actifs plutôt qu’aux transports collectifs réguliers ("effet calamar")
  • Ne pas limiter l’aménagement des villes au centre historique mais étendre les priorités d’aménagement vers le périurbain ("œuf au plat")
  • Végétaliser les axes dédiés aux modes actifs pour assurer un confort d’usage ("ruisseau de fraîcheur"), notamment dans un contexte de changement climatique induisant en particulier une augmentation des températures et de la fréquence des canicules en période estivale
  • Réduire les coupures urbaines en reconquérant l’espace publics pour le végétal et les modes actifs, et créer des « rocades fraîches »
  • Penser à l’ensemble des motifs de déplacements et ne pas se concentrer uniquement sur les déplacements domicile-travail
  • Identifier des zones adaptées à une mixité des mobilités : Transports collectifs-vélo-piétons voire voiture (à vitesse limitée), pour assurer la circulation de l’ensemble des modes alternatifs à la voiture. Les « carrefours vivants » développés en Suisse permettent ainsi d’adopter une logique d’apaisement (zone de rencontres), d’aménager des sols plus qualitatifs, de végétaliser… Les feux ne sont alors plus nécessaires, ce qui simplifie les circulations et permet aux piétons et aux cyclistes d’adopter des lignes de désir plus libres lors de la traversée du carrefour, rendant au final les déplacements plus fluides pour tous, y compris les TC et les autres véhicules motorisés.

Pascal Terrasse a notamment rappelé les leviers de décarbonation des mobilités : tout d'abord éviter et réduire les déplacements en voiture, puis changer les pratiques pour limiter l’autosolisme et encourager le report modal, et enfin améliorer l’efficacité des déplacements avec la transition énergétique des mobilités et le déploiement de véhicules plus légers adaptés aux usages.

Pour éviter des déplacements en voiture, il est nécessaire d’articuler l’urbanisation avec les systèmes de mobilité, afin d’encourager l’usage des transports collectifs, des modes actifs et favoriser l’apaisement de la ville : 
  • Densifier et renforcer la mixité fonctionnelle (habitat, commerces, loisirs, activités) autour des gares et des arrêts de transports collectifs pour encourager leur usage,
  • Prévenir la ségrégation spatiale entre populations en planifiant et en assurant la desserte des quartiers prioritaires de la ville par des transports collectifs (à haut niveau de service)
  • Prévenir les coupures urbaines pouvant être engendrées par les lignes de TC, pour assurer la fluidité des déplacements en modes actifs et la porosité des quartiers
  • Assurer l’accessibilité piétonne et vélo des gares et des arrêts pour assurer un rabattement vers les lignes du réseau et la marchabilité des espaces publics (requalification des parvis de gare)
  • Requalifier les itinéraires de transports collectifs de façade à façade pour encourager les modes actifs. 

Changer les pratiques demande de développer des réseaux alternatifs à la voiture performants (transports collectifs et modes actifs). 

Développement des transports en commun :

Il passe par le développement de lignes de transport collectif accessibles à tous, et offrant un bon niveau de service, dans les villes, mais aussi dans les périphéries et vers le périurbain, qui constituent dorénavant des territoires prioritaires de déploiement de l’offre de transports collectifs. Le développement des "services express régionaux et métropolitains" permettra d’améliorer l’offre vers les territoires périurbains, qui est aujourd’hui en carence. 

La réalisation d’un projet de transport collectif à haut niveau de service offre en principe l’occasion de requalifier l’espace public environnant de manière intégrée, en favorisant les modes actifs et l’accessibilité PMR, en intégrant des multiples enjeux (sécurité des déplacements, qualité du cadre de vie, maintien et développement d'activités riveraines et d'animations, adaptation de la voirie au changement climatique...).

Développement des modes actifs : 

Le Cerema accompagne par ailleurs les collectivités pour rendre les territoires 100 % marchables et cyclables. Les aménagements en faveur du vélo sont multiples : aménagements à haut niveau de service (réseau cyclable à haut niveau de service), aménagements mutualisés avec les bus, zones partagées dans lesquelles la réduction du trafic et des vitesses des voitures peut permettre une cohabitation voiture-vélo, sans oublier le développement de stationnement vélo sécurisés.

Pour développer la marche, il est nécessaire d’assurer la sécurité des piétons et notamment des personnes âgées (sur-représentées dans les accidents mortels : 45 % des piétons tués ont plus de 65 ans, alors qu’ils représentent 21 % de la population -source bilan ONISR 2023) et d’accessibilité des espaces publics pour tous. Le Cerema co-anime, avec le CVTCM, la communauté Mobilités piétonnes dans le cadre du programme national ID-marche pour favoriser les échanges techniques, organiser des webinaires et du partage d’expériences.

 

La communauté

Apaiser la ville :

 

Enfin, apaiser la ville nécessite d’améliorer la qualité d’usage des espaces publics et le confort des usagers :

 

  • Développer des aménagements confortables et inclusifs, développer le design actif (des aménagements légers qui incitent à l’activité physique)
  • Développer des îlots de fraîcheur
  • Repenser la ville "à hauteur d’enfants"
  • Adapter l’éclairage aux besoins des piétons, cyclistes, et usagers des transports collectifs (tout en optimisant les dépenses énergétiques et en prenant en compte les enjeux de biodiversité)
  • Plus largement, travailler sur l’adaptation de la ville au changement climatique pour assurer la marchabilité de la ville et son apaisement (en lien notamment avec le programme "+4°C" du Cerema). La végétalisation est un levier important d’apaisement des villes et de confort pour les usagers. Les infrastructures TC et vélo doivent intégrer cette composante. L’espace public auparavant très majoritairement dédié à la voiture doit être réparti entre transport collectifs, vélo, marche et végétalisation. Le Cerema va travailler sur la végétalisation des projets de transports collectifs. 

Une plateforme pour tester la sécurité des véhicules automatisés

Piste de la plateforme actuelle
Piste de la plateforme PAVIN 1 déjà en service - Cerema

Un panorama des enjeux de l’évaluation de la sécurité des véhicules automatisés en conditions météorologiques dégradées a été présenté par le Cerema. Une illustration est donnée sur les projets de recherche PRISSMA, AWARD et ROADVIEW que conduit l’équipe de recherche STI (Systèmes de transports intelligents) avec l’appui de sa plateforme PAVIN B P (Plateforme Auvergne pour Véhicules Intelligents - Brouillard-Pluie), référencée au sein du Centre international de recherche Systèmes innovants pour les transports et la production de l’I-SITE clermontois CAP20-25.

Une modernisation de cette plateforme verra le jour en 2024, ce qui lui permettra un positionnement accru sur l’évaluation et l’homologation des véhicules automatisés en conditions météorologiques dégradées prévues par la réglementation européenne.

Solutions pour améliorer la performance des bus : les voies uniques ou temporelles

bus à haut niveau de service de LyonChristian Sautel, directeur de projets Insertion urbaine des transports en commun au Cerema, a participé à cette table ronde avec Olivier Delerue Chargé de mission performance des bus au SEMITAN et Damien Garrigue, chef de projet bus à Nantes Métropole. Ils ont présenté les solutions de voies uniques ou temporelles pour améliorer la performance des bus.

Dans un contexte où les villes recherchent l’optimisation de leur réseau bus, tout en développant les aménagements dédiés aux modes actifs dans des rues aux profils en travers contraints, le Cerema et le réseau de Nantes (Nantes Métropole et Semitan) se sont associés pour monter un groupe de travail sur les couloirs bus bidirectionnels à voie unique : il s’agit d’une seule voie dédiée aux bus, sur laquelle les bus circulent dans les deux sens, avec un système d’exploitation efficace et innovant. 

Initialement national (AOM, exploitants), ce groupe a désormais une dimension internationale avec la participation régulière de l’UITP, du ministère du Luxembourg, et de réseaux belges, suisses, espagnols, portugais. Le Gart et l’UTP y participent également. D’autres pays vont prochainement rejoindre ce groupe de travail.

Plusieurs retours d’expérience ont pu être présentés lors de cette intervention aux RNTP (voies bus alternées dans le temps, dans l’espace, gérées par feux ou en conduite à vue), y compris des couloirs bus temporels (voies bus aux heures de pointe, stationnement ou circulation routière aux heures creuses). L’exemple du bus remontant à contre-sens la voie routière à Zurich a permis d’explorer de nouvelles idées restant à expérimenter en France.

Les échanges ont porté notamment sur le gain procuré par ces aménagements, sur le respect par les usagers routiers, ainsi que sur l’acceptabilité par les conducteurs de bus. Le Cerema envisage de produire une fiche de capitalisation et de recommandations sur ces voies uniques.

La présentation :

Aménagements cyclables: le Cerema répond aux questions

Suppression du stationnement motorisé en amont des passages piétons, double-sens cyclable pour les vélos cargos, ville à 30, réseau cyclable à haut niveau de service, compétence voirie... le Cerema s'est prêté pendant 45 minutes et sans filet au jeu des questions réponses avec le public. 

Pour tout savoir sur la réglementation et les recommandations pour les infrastructures cyclables :

Prévenir les conflits piétons-cyclistes : quelles pistes pour améliorer la cohabitation entre les modes ?

Atelier aux RNTPUn atelier immersif "Prévenir les conflits piétons/cyclistes" a été animé par l’Académie des mobilités actives (Adma), le Cerema et le Club des villes et territoires cyclables et marchables (CVTCM) mercredi 18 septembre, dans le cadre du congrès du CVTCM. Cette session s'inscrit dans une série d'ateliers piétons-cyclistes déjà organisés en 2023 à Lille, Montpellier et Bordeaux.

Les participants ont travaillé sur plusieurs cas fictifs (correspondant à différents statuts de voiries) où peuvent apparaître des conflits entre piétons et cyclistes mais aussi entre piétons et utilisateurs d'engins de déplacements personnels motorisés : aire piétonne, zone de rencontre, carrefour complexe, abord d'un pôle d'échanges. Comment organiser une cohabitation qui fonctionne ? Dans quels cas est-il nécessaire de séparer les usages ? Le Cerema a notamment rappelé les aspects réglementaires, ainsi que les domaines d'emploi de ces espaces, et a fait un focus sur la nécessité de travailler à la fois sur les aménagements, les fréquentations, ainsi que sur les comportements.

Le développement important des parts modales cyclistes, mais aussi l'augmentation de l'usage des engins de déplacement personnel motorisés (EDPM) peut créer des tensions, en particulier lorsque les aménagements ne sont pas adaptés.

Ces conflits entre piétons et cyclistes sont pointés par 53 % des répondants du baromètre des villes marchables, et par 43 % des répondants du baromètre des villes cyclables. Concernant l'accidentalité routière, le nombre d'accidents mortels entre piétons et cyclistes reste pourtant relativement faible (2 à 3 tués par an), si on le compare aux accidents mortels entre piétons et véhicules motorisés (un peu moins de 500 par an).